C.-O. Verseau professeur agrégé de philosophie

STMG / Cours du 8 avril / Art et réalité

L'art nous éloigne-t-il de la réalité ?
peinture surréaliste ou, au contraire, hyperréaliste ?
Si elle est surréaliste alors l'oeuvre s'éloigne de la réalité en lui superposant une autre réalité... en lui préférant une autre réalité qu'elle place « au-dessus » de la première, de la vraie réalité … telle est du moins l'interprétation qu'on peut donner de la préposition « sur » dans « surréalisme ».
Si la peinture de Magritte devait être qualifiée de « hyperréaliste », cela voudrait dire au contraire que l'oeuvre se veut une copie on ne peut plus fidèle de la réalité qu'elle représente, qu'elle montre, fidèle au point qu'elle pourrait nous tromper, faire que nous prenions la copie pour le modèle, le tableau pour la réalité.
Or le tableau intitulé Les valeurs personnelles nous représente des objets familiers d'une façon telle que nous les reconnaissons aussitôt (avec une tendance illusionniste, tendance au « trompe-l'oeil » > hyperréalisme). Cependant, la taille surdimensionnée des objets nous indique aussitôt, également, que ces objets ne sont pas réels, qu'il s'agirait donc d'une « sur-réalité ». 
Comment donc concilier les deux? Comment, si ce n'est en pensant qu'une oeuvre ne cherche jamais à montrer "la réalité telle qu'elle est", mais telle que nous la voyons et, par conséquent, à montrer que nous pourrions la voir autrement que nous la voyons.
Voir n'est pas seulement constater l'existence de quelque chose, mais c'est aussi, c'est surtout attribuer un sens, une importance, donc une valeur. Voir c'est hiérarchiser ce que nous voyons.
Dans Les valeurs personnelles, Magritte montre la perception de quelqu'un (une personne qui pourrait être moi...) qui considère que le plus important dans sa vie (= son mode de vie) ce serait  de « bien présenter » (plus que d'être vraiment présent), d'être bien rasé, bien peigné, d'avoir un lit où on dort et qui ne sert qu'à cela, où on y fait des choses « présentables » ou, sinon, qu'on doit oublier en refaisant le lit à la perfection, comme si personne n'y avait dormi ou aimé, etc.