C.-O. Verseau professeur agrégé de philosophie

TMD / Mercredi 22 janvier / L'art : la matière et l'esprit

  1. Le dedans / le dehors
Toute œuvre d'art suppose une matérialité. D'ailleurs, les « systèmes des beaux-arts » = de classification des arts reposent sur le constat qu'il y aurait des degrés de matérialité et de spiritualité différents permettant de hiérarchiser les arts.

architecture
sculpture
peinture
musique
poésie

[hiérarchie proposée par Hegel, Esthétique (début 19è)]
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+ littérature
danse
théâtre
opéra
marionnettes
pantomime
cirque
cinéma
photographie
bande dessinée

La question du « beau », de la beauté, ne serait-elle pas une façon de répondre au besoin proprement humain d'ordre, de sens, de régularité, dont il cherche au dehors (de son esprit), « dans » le réel, une cor-respondance (réponse).

  • Une œuvre d'art, c'est un bel objet créé par l'homme, par l'art de l'homme (arte-fact), représentant une beauté existant déjà dans le monde. L'art comme « représentation » de ce qui serait déjà présent dans le monde >>> « monde » (contraire de « immonde »), « cosmos » (cf . « cosmétique »)
  • une œuvre d'art est une façon de faire être, de faire se tenir, se dresser (ex-sister) une beauté qui n'existait pas déjà. Si le monde n'est plus une chose, une forme avec des contours, des limites (une belle sphère régulière) mais un univers infini, peut-être un quelque chose d'im-monde, dès lors l'art humain serait une façon non plus de représenter une beauté déjà présente, pré-existante, mais tout au contraire une façon de satisfaire le besoin humain de beauté au sein d'un « réel » déceptif, décevant.
  • Moins optimiste, l'hypothèse selon laquelle la démarche de l'artiste ne consisterait ni à représenter une beauté préexistante (dans le monde, voulue par une divinité créatrice de ce « monde », etc.), ni à produire une beauté inédite, mais à déplorer l'absence (à la signifier : l'oeuvre serait le signe de cette absence, son indice) de beauté, d'ordre, de mesure et dans le réel et dans l'humain qui pense ce réel.
Nb : Le thème du micro-cosme humain reproduisant, représentant l'ordre, les proportions, l'ordre déjà présents dans le macro-cosme.
Les textes de l'antiquité grecque (Platon, Timée, 4ème avant) ou latine (l'architecte Vitruve 1er avant), repris à la Renaissance (Vinci, 15ème : « L'homme de Vitruve ») témoignent de ce regard « optimiste » posé sur le réel et sur l'être humain, partie de ce réel : l'ordre, la beauté, la proportion seraient partout et même, et d'abord, en l'homme, cet être qui doit comprendre l'ordre du grand tout, qui régit l'ensemble du réel.
cf. La Mirandole, De la dignité de l'homme (fin 15ème)


Aucune démarche artistique ne manifeste plus clairement la quête humaine de beauté, de sens, d'ordre que le geste de dresser, de diriger, d'orienter un … « gros caillou », un élément de la matière apparemment la moins noble, la moins spirituelle : la pierre.