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« ne pas pouvoir dépasser la subjectivité»
2
« choix individuel »
La
difficulté pour comprendre cette différence vient du fait que le
lecteur risque de voir la limitation là où elle n'est ...pas !
Ne
pas pouvoir, « l'impossibilité de dépasser la subjectivité »
devrait se reformuler, positivement, en ne pas pouvoir « se
passer de ». En effet, tout repose sur la subjectivité
– ce qui ne veut PAS dire que chaque sujet soit enfermé en
lui-même, dans son intériorité, dans son ego.
>
tout « repose sur » (comme invite déjà à le penser le
préfixe sub dans le mot latin subjectum, ou le mot anglais subject)
signifie que le su(b)jet est le fond à partir de quoi tout le reste
est possible. Tout repose sur le sujet (qui est donc « dessous »)
au sens où tout « part » de lui (d'où l'expression « à
partir de).
Rq :
dire que les fondations d'une maison sont ce sur quoi la maison
« repose » ne revient pas à dire que toute la maison
serait enfermée à l'intérieur de ces mêmes fondations, dans la
cave par exemple ! Au contraire, ce qui fonde permet l'élévation
(de l'édifice), l'élan, la relation, etc.
A
l'inverse de ce que le lecteur (l'auditeur de la conférence en
octobre 1945!) serait tenté de comprendre, la limitation ne se
trouve donc pas dans la formule « impossibilité de
dépasser la subjectivité » mais dans l'autre : « choix
du sujet individuel » !
Car
cette formule a tendance à nous faire croire que la subjectivité,
c'est « seulement » le ...« subjectif »,
ce qui ne peut être mis en commun, ce qui ne peut être compris par
un autre sujet, ce qui empêche la relation, la communauté, le
collectif.
Rq :
dans la langue usuelle, il n'est pas rare de rencontrer cette
acception péjorative du mot « subjectif », confondu avec
« personnel », « privé » (opposé à
public), « individuel » ou « particulier » :
serait « subjectif » ce dont on ne peut discuter (comme
les goûts etc.).
L'enjeu
de cette ...insistance sur la question de la subjectivité qui est le
« premier principe de l'existentialisme » (p3, l.
33) est de poser la responsabilité du sujet précisément. Nul ne
pourra dire (en se dérobant, en se défaussant) : c'est
pas moi, c'est l'autre qui l'a dit, c'est l'autre qui l'a voulu, qui
m'a dit de le faire . « l'autre » ? autrui, la loi,
le système, le monde. cf. l'expérience de Milgram (et tous ses
dérivés … le film d'Henri Verneuil, I comme Icare ou le documentaire Zone extrême) qui met en évidence la
« soumission à l'autorité ». Mais aucune « soumission »
n'enlève à un sujet sa responsabilité car c'est toujours le sujet
qui pose une autorité comme telle.