C.-O. Verseau professeur agrégé de philosophie

Prise de notes en cours / 12 déc / Sartre / "ex-istence"

EX-sistence, ex-sister :
sistere : se tenir, s'efforcer de (voix pronominale > rapport à soi, réflexivité, flexion jusqu'à faire retour vers soi, …)

ex >
ex-tériorité, ex-primer,
ex-terminer
expirer
exténuer
exporter
exhibition
exagérer
extinction
extensible
exposition
exploiter
expertise
exorcisme
expatrier
exiler
exhumer
exemple
excuser
exaucer
exigent
excentrique
excellent
exalter
exaspérer
extrapoler
examiner
extorquer
exclure
expérience
exonérer
extrader


ex = marque de l'extériorité, le dehors, on va à l'extérieur, on sort
toutefois, « ex » c'est plus exactement l'idée de provenance.
C'est-à-dire dans « ex » il y a l'idée de l'endroit vers lequel on se diriger mais tout autant voire plus l'idée de ce qu'on quitte.
Ex = pro-venance = le lieu « à partir duquel on se porte vers un autre »

pour l'être humain, être c'est « inventer » ce qu'il sera. En ce sens, il s'agit donc de s'ex-traire des déterminations qui pèseraient sur lui (qu'elles soient d'ordre naturel ou d'ordre social, culturel : je suis un garçon, une fille, je suis fils de médecin ou d'ouvrier, je suis physiquement une personne « en situation de handicap »).
Chaque être humain est en effet « en-dehors » de lui-même au sens où aucune définition de lui ne l'enferme dans un comportement donné, aucune dé-finition n'est une dé-termination puisque chaque sujet porte un regard sur ce qu'il est, prend position, évalue ce qu'il est = se « trouver » bien, « trouver » bien d'avoir ceci ou cela

Le verbe « trouver » est lui-même significatif : il suggère une rencontre avec soi-même, comme s'il s'agissait de se découvrir > en tout cas il rappelle que je ne suis pas ceci ou cela mais je suis un regard sur ceci ou cela (regard = interprétation qui donne sens, qui donne une valeur).
Ce « regard » traduit la tension qui dans le « ex » : physiquement, socialement, culturellement, etc., on m'a fait être ceci ou cela. En un sens je le suis bon gré mal gré, mais « à partir de » ce que je suis, je porte un regard « dessus », je « sors » de, « hors de » ce que je suis. Non pas au sens où je le quitte tout à fait (je reste cet humain avec ce corps, avec cette condition sociale, je reste fils de boulanger), mais j'ai un « rapport à » ce que je suis. Or toute relation est une mise à distance, une distinction.
Tout ce qui concerne le passé nous fournit les meilleurs exemples pour comprendre la tension propre à l'acte d' « ex-sister » : puisque je ne pas refaire le passé, puisque je ne peux pas faire qu'un événement passé n'ait pas eu lieu, je suis donc en un sens mon passé – je suis fils de Eichmann – mais comme j'ai un regard sur mon passé (je le juge) et que je peux en changer (c'est ce qu'on appelle « grandir ») je ne suis pas enfermé dans ce passé, je ne suis pas mon passé : j'ai un passé, je suis responsable de ce que j'en dis, de ce que j'en pense = de ce que j'en fais.
Par exemple chacun pourrait être tenté d'expliquer (de façon causale) ce qu'il est aujourd'hui par un passé qui l'aurait déterminé à être ce qu'il est (milieu social, éducation, environnement familial).