C.-O. Verseau professeur agrégé de philosophie

TL1 / Interrogation / Corrigé / 12 septembre 2013


1. Quelle est l'étymologie du mot « individu » ? Que présuppose-t-elle ?

Un « individu » est la dernière partie indivisible d'un ensemble. Cette étymologie présuppose que tout individu n'existe que comme partie du tout auquel il ap-partie-nt : l'individu constitue une entité mais cette entité indivisible ne peut exister qu'en rapport avec le tout dont elle n'est qu'une partie. Des « individus » ne peuvent donc exister qu'au sein d'une communauté (Etat, société, ethnie, etc.) dont ils sont les composants indivisibles.

2. « Le citadin qui ne connaît et ne nomme que des arbres ne voit pas le monde à travers les mêmes formes que le paysan qui reconnaît et distingue le chêne, le charme, le hêtre, l’aulne, le bouleau, le châtaignier, le frêne ». Cette remarque invite-elle à définir le langage comme un outil ? Dans votre réponse vous indiquerez le nom de l'auteur et le titre de son ouvrage.

Dans ce passage de Clefs pour la linguistique, Georges Mounin rappelle que le langage n'est pas un outil permettant d'agir sur les choses et de les transformer, mais qu'il permet d'abord de les faire être pour nous, de les faire apparaître : par le langage nous « appelons » les choses au sens de les dénommer et de les faire venir à soi, de les rendre présentes à nous. Chacun habite un monde peuplé des seules choses qu'il peut nommer.

3. Selon quel critère regroupe-t-on certaines sciences et distingue-t-on ces mêmes sciences d'autres sciences ? Proposez une classification des sciences.

Le critère de classification des sciences réside dans l'objet observé, la chose étudiée. C'est ainsi qu'on distingue les sciences humaines qui étudient l'homme (sociologie, économie, psychologie, etc.), des sciences expérimentales qui étudient les corps physiques extérieurs vivants ou non (physique, chimie, biologie) et des sciences hypothético-déductives qui étudient des figures géométriques, des relations entre les nombres ou des règles de raisonnement qui n'existent pas ailleurs que dans ou pour notre esprit (mathématiques, logique).

4. « Matière », « curieux », « avoir du goût » : à propos de l'emploi de chacun de ces trois mots, on observe un glissement de sens. Expliquez en quoi consiste ce glissement et appliquez la même explication à un quatrième mot : le mot « sujet ».

Pour chacun de ces mots on observe un glissement : le même mot s'appliquant à la chose (qui a une saveur, peut-être des caractéristiques surprenantes et sans doute qui constitue une réalité dont les propriétés physiques sont celles de toute chose « matérielle ») s'applique également, au risque de certaines confusions, à la personne (qui sait apprécier la saveur de la chose, qui se montre curieuse des choses) ou à la connaissance (qui porte sur cette « matière »). D'ailleurs l'emploi du mot « sujet » est lui-même source d'ambiguïté puisqu'il désigne tantôt ce sur quoi une personne réfléchit (un « sujet de réflexion ») et l'auteur de cette réflexion (le "sujet" de l'acte de réfléchir).


5. En quoi l'étymologie du mot « savoir » permet-elle de distinguer le véritable savoir d'une simple connaissance ? 

Puisque « savoir » c'est savourer le goût de la connaissance acquise, sentir l'amertume ou la suavité de cette connaissance, c'est donc être affecté par le fait de connaître, en ressentir un certain effet et, tout particulièrement, changer de conduite.

6. Quelles sont les 5 parties du programme de philosophie ?

Le sujet, la culture, la raison et le réel, la politique, la morale.

7. Citez six valeurs. Donnez un exemple de situation qui permette de distinguer deux valeurs de votre choix. Qu'est-ce qu'une valeur ?

Le bon (le bonheur), le beau (l'art), le bien (la morale), le vrai (la vérité), le juste (la justice), le sacré (la religion). Le mensonge est une façon de valoriser mon bonheur aux dépens du bien moral (je mens pour me tirer d'un mauvais pas) ou le bien moral aux dépens de la justice (en cherchant à protéger des personnes poursuivies par l'exécution d'une justice moralement condamnable – le cas des lois scélérates sous le régime de Vichy). Une valeur est ce qui permet d'évaluer ses propres actes, de les justifier et de les orienter : de dire pourquoi je dois vouloir les accomplir (même si l'action ne me permet pas d'atteindre mon but). La valeur est donc au-delà du but poursuivi à travers telle ou telle action, car chaque action peut devenir à son tour un moyen en vue d'une autre, qui deviendra un but à atteindre. La valeur est un pourquoi qui ne s'applique pas à une seule action mais qui oriente l'ensemble des actions accomplies. Une valeur est un pourquoi qui a un sens non relatif mais absolu. Si quelqu'un veut honorer la justice, ce n'est pour rien d'autre derrière la justice, rien d'autre que la justice elle-même.